Séminaire MIDLOS - S. Akin

Nomination toponymique et représentation discursive en situation de conflit : l'exemple de la ville de Kobané

Salih Akin

Maître de conférences

Université de Rouen Normandie, DYLIS

Les attaques du groupe EI contre la ville de Kobanê en Syrie au début du mois d’octobre 2014 et la résistance acharnée des combattants kurdes ont donné lieu à une importante médiatisation internationale. Les médias français (audiovisuels comme la presse écrite) ont couvert ces événements au moment où le groupe EI avançait sur le terrain en Syrie et en Irak et au moment où Kobanê, encerclé de partout, était sur le point de tomber aux mains de cette organisation. Ces couvertures médiatiques ont débouché sur la production d’une grande quantité de discours réunis dans un corpus. Les analyses auxquelles le corpus sera soumis sont de plusieurs niveaux : d’une part, dans la lignée des travaux sur la nomination des pays dans la presse française (Gislaru, 2005) et la nomination des événements médiatiques (Moirand, 2007, Krieg 2003, Krieg 2000, Calabrese Steimberg, 2012, Veniard, 2007, Guilhaumou 2000), j’analyserai le choix du toponyme pour désigner la ville : en effet, au début du conflit, la ville a été d’abord désignée par le nom arabe Ayn al-Arab, nom qui révèle un acte de renomination de la ville par le régime syrien.  Ce n’est que progressivement que Kobanê a supplanté Ayn-al-Arab, au fur et à mesure que les combattants kurdes ont opposé une résistance en gardant le contrôle, même partiel, de la ville. Cette étude permettra de suivre chronologiquement l’évolution de la nomination de la ville ainsi que les éventuelles nominations coréférentielles.
D’autre part, j’examinerai les « potentialités de signifiance » du toponyme Kobanê (Siblot 1997) et la façon dont il est devenu un « organisateur mémoriel » (Paveau 2008). Le conflit et la résistance ont imprégné dans le toponyme une série de significations qui seront analysées en prenant en compte les instances énonciatives et leur stratégie de nomination comme représentation discursive d’un rapport à la ville.
 
Références :
Akin S., 1999 (éd.), Noms et re-noms : la dénomination des personnes, des populations, des langues et des territoires, Collection DYALANG-PUR, Université de Rouen, 287 p.
Akin S. 2017, « Langues et discours en situation de guerre : une approche sociolinguistique et pragmatique  », Lengas n°80 | 2016, mis en ligne le 23 mars 2017, URL : http://lengas.revues.org/1177  Calabrese Steimberg L., 2012,  « L'acte de nommer : nouvelles perspectives pour le discours médiatique », Langage et société, n° 140, p. 29-40.
Cislaru, G. 2005, Étude sémantique et discursive du nom de pays dans la presse française avec référence à l’anglais, au roumain et au russe, thèse en sciences du langage, Université de la Sorbonne nouvelle Paris 3.
Guilhaumou J., 2000, « Un nom propre en politique : Sieyès », Mots. Les langages du politique, n° 63, juillet, Noms propres, p. 74-86.
Krieg, A. 2003, Purification ethnique. Une formule et son histoire, Paris, CNRS Éditions.
Moirand, S. 2007,  Les discours de la presse quotidienne. Observer, analyser, comprendre, Paris, PUF.
Paveau M.-A., 2008, « Le toponyme, désignateur souple et organisateur mémoriel. L’exemple du nom de bataille », Mots, 86, pp.23-35.
Siblot P. 1997, « Nomination et production de sens : le praxème », in Langages, 127, pp.38-55
Veniard, M. 2007, La nomination d’un événement dans la presse quotidienne nationale. Une étude sémantique et discursive : la guerre en Afghanistan et le conflit des intermittents dans Le Monde et Le Figaro, thèse de doctorat, Paris 3.
Date: 
Lundi, 24 avril 2017 -
14:00 à 15:15
Lieu: 

IRED